Le code forestier de 1827 met en place une administration des Eaux et forêts qui restera la même, dans ses grandes lignes, jusqu'en 1964. D'abord rattachée au ministère des Finances, et à partir de 1877 sous l'autorité du ministère de l'Agriculture et du commerce, elle comptait une direction générale, des services extérieurs et des écoles forestières. Les services extérieurs étaient appelés Conservations, elles-mêmes subdivisées en inspections, sous-inspections et triages.
La politique de restauration des terrains en montagne elle-même est lancée à la suite de deux lois fondatrices. La première de ces lois, celle du 28 juillet 1860 prévoyait des subventions en graines, plans ou argent aux propriétaires publics ou privés de forêts en montagne qui étaient volontaires, ou dans le cas contraire, elle prévoyait l'acquisition ou l'expropriation de terrains où le reboisement était considéré comme obligatoire, au titre de l'utilité publique. La loi du 8 juin 1864 complète la première dans la mesure où elle ouvre la possibilité de substituer l'engazonnement au reboisement. Pendant environ vingt deux ans, ces deux premières lois sont appliquées par les structures administratives intermédiaires, les services extérieurs, au niveau de la Conservation des Eaux et forêts, dans les régions concernées. Ils sont à l'origine de l'établissement des périmètres de reboisement correspondant aux différents bassins à risque, des enquêtes d'utilité publique, des procédures d'éventuelles acquisitions ou expropriation et de l'approvisionnement en graines et plans.
Les deux lois de 1860 et 1864 furent abrogées et remplacées par la loi du 4 avril 1882. Elle consolide la notion de restauration des terrains en montagne, qui a donné son nom au service créé pour la mettre en œuvre. Ce texte renforce tout d'abord les mécanismes de déclaration d'utilité publique des travaux dans les périmètres, maintenant obligatoirement décrétée par loi, et d'expropriation de terrains, assortie d'une indemnisation. Il officialise les travaux avant plantation, les barrages visant à stabiliser le lit des torrents et la mise en défens des sols dégradés, notamment des pâturages communaux. Les subventions de l'Etat sont élargies aux travaux de génie civil, de reboisement ou de mise en valeur des pâturages et d'améliorations pastorales. Commencent les travaux facultatifs d'améliorations pastorales, telles que la construction de fruitières, qui se prolongeront jusqu'en 1976. Suite aux graves inondations de 1910, la loi de 1882 est amendée en 1913 avec notamment l'abandon de la restriction des périmètres aux " dangers nés et actuels " dans le but de les agrandir et de mieux maîtriser les débits des torrents et rivières. En 1933 un nouvel amendement renforce cette tendance.
Après cette période de grande impulsion dans les travaux obligatoires et facultatifs, qui va jusqu'à la veille de la première guerre mondiale, le service de restauration des terrains en montagne s'applique à la gestion des acquis, ainsi qu'à l'accompagnement de la déprise agricole en montagnes et des grands chantiers de lutte contre le chômage. Cependant, le début de la seconde guerre mondiale marque le début de la décadence des activités traditionnelles du service de RTM (la stabilisation de terrains, les boisements ou l'engazonnement, les ouvrages de génie civil) au profit de la surveillance et de la cartographique des avalanches.
La réforme Pisani de 1964, créant notamment les Direction départementales de l'agriculture (DDA) et l'Office national des forêts (ONF), et ses décrets d'application en 1966 sont à l'origine de la partition des anciens forestiers de l'Administration des Eaux et Forêts entre les nouvelles entités. Avec la création de l'EPIC, des conventions ETAT-ONF attribuent à ce dernier des missions de restauration de terrains en montagne. Entre 1966 et 1971, il n'existe plus de service RTM constitué, les missions de celui-ci étant assurés par les techniciens et ingénieurs de terrain de l'ONF (surveillance des périmètres, conception d'ouvrages et réalisation ainsi que l'étude de périmètres avec établissement de dossiers de déclaration d'utilité publique).
Il faut attendre la circulaire Cointat de 1971, pour assister au débuts de la réorganisation au sein de l'ONF d'un service unifié et spécialisé de RTM, cette fois-ci tourné vers la prévention des risques naturels, leur cartographie, et leur prise en compte dans les plans d'aménagement. Neuf ans plus tard, en 1980, les services RTM n'étant pas encore réunifiés définitivement, un nouvel effort est fait dans ce sens, mais c'est graduellement, à chaque convention quinquennale Etat-ONF, que le service RTM se renforce. Ainsi, la mise en place au sein de l'ONF du service RTM, avec une Délégation nationale comportant une Direction technique, un Secrétariat général, et neuf services départementaux sous l'autorité des Directeurs Territoriaux ONF, s'est étalée sur de longues années, s'étant achevée avec l'instruction INS-07-T-62 du 26 janvier 2007.
NB: Pour ce qui est des différentes appellations qu'a connu le service responsable du reboisement, la circulaire n° 806 du 01/06/1861, en désignant les travaux à accomplir par les agents des Conservations concernées, les appelle " les agents spéciaux " d'où l'appellation de " service spécial " courante pour désigner le " Service du reboisement " et, après 1882, le " Service de restauration des terrains en montagne ".
Organisation administrative dans les Hautes-Alpes
À l'apparition des lois relatives au reboisement, le département des Hautes-Alpes faisait partie de la Conservation Drôme-Hautes-Alpes, dont le siège se situait à Valence. En 1865, l'arrondissement d'Embrun, dans les Hautes-Alpes, était pourvu d'un agent spécial chargé des missions dans le cadre du reboisement. En 1875, Gap abrite la 35e Conservation, divisée en Inspections, Cantonnements et périmètres. La mention d'un service du Reboisement est courante dès 1869 et celle d'une Inspection et/ou commission des reboisements date des années 1870.
Les archives témoignent de l'existence, en 1884, de la 10e Conservation des Eaux et Forêts dont le siège était à Gap. Trois services y semblent regroupés : le service ordinaire assurait la gestion des forêts communales et domaniales et la surveillance des délits ; le service du Reboisement et le service d'études pastorales (ou service pastoral) mettent en œuvre les prérogatives établies par la loi de 1882.
En 1889, le service technique chargé de l'exécution de tous les travaux de reboisement et de correction est fusionné avec le service ordinaire. Deux ans après, en reconnaissant que le service peine à gérer les forêts et exécuter les travaux, un arrêt ministériel scinde le service général en deux : l'un pour les travaux forestiers et l'autre pour les principaux travaux de correction. Le nouveau service est dénommé " Service (spécial) du reboisement " (" Service spécial du reboisement et des aménagements " à partir de 1900).
Placé sous la direction immédiate du conservateur, le service des reboisements et des aménagements de Gap doit être considéré comme un auxiliaire du service local, et son intervention n'a lieu dans les séries que sur un ordre du chef de circonscription, en général à la suite de demandes des inspecteurs du service ordinaire. Les chefs de cantonnement sont restés chargés d'exécuter dans les périmètres les travaux de reboisement proprement dits (enherbement, plantation, travaux rustiques, fascinages, garnissages, clayonnages), et exceptionnellement de la construction de seuils ou de murettes. Les deux services (service local / service du Reboisement) ont donc des attributions distinctes. En 1897, est créé un service topographique, sous l'autorité de l'inspecteur du reboisement.
En 1921, le Service spécial du reboisement et des aménagements est renommé " Commission des aménagements, reboisements et améliorations pastorales et forestières ". Ces deux appellations subsistent ou oscille pendant quelques années. Il était composé par un inspecteur, un garde général, deux brigadiers et un géomètre. Le service ordinaire, divisé en inspections (Gap-Est, Gap-Ouest, Embrun et Briançon) chacune comptant un inspecteur, un chef par cantonnement, plusieurs brigadiers et gardes par cantonnement.
Une nouvelle distribution d'attributions voit le jour en 1933. Au service de reboisement sont confiés l'aménagement, le reboisement, les acquisitions, les travaux à exécuter dans le Parc de Pelvoux (Parc des Écrins) et en termes d'améliorations pastorales, les plans et les dessins. Le service ordinaire est alors responsable par les études et travaux relevant des améliorations pastorales, ainsi que les améliorations forestières.
En 1935, les séries (à l'intérieur des périmètres) sont confiées soit au service ordinaire, soit au service du reboisement. On confie essentiellement au service du reboisement les séries neuves, surtout celles de grande superficie (travaux de correction ou de boisement). Les séries anciennes sont confiées au service ordinaire (contrôles réguliers, travaux d'entretien). Mais le service du reboisement sera chargé des travaux importants, même dans les séries récentes gérées par le service ordinaire. A ce moment, les séries gérées par le reboisement sont :
- Buëch supérieur : Aspres-sur-Buëch (ancienne commune d'Agnielles-en-Beauchêne)
- Buëch inférieur : Montéglin, Châteauneuf-de-Chabre
- Drac supérieur : Champoléon (torrent de Méollion seulement), La Motte-en-Champsaur (ancienne commune de Molines)
- Drac Souloise : Saint-Etienne-en-Dévoluy
- Drac Séveraisse : Guillaume-Peyrouse (Parc National seulement), Clémence-d'Ambel
- Durance-Luye : Jarjaye, Bréziers, Rochebrune
- Durance d'Embrun : Embrun, Les Crottes, Les Orres et Saint-Sauveur
- Haute-Durance : Saint-Crépin, Eygliers, Freissinièrs, L'Argentière, Les Vigneaux, Pelvoux et Saint-Chaffrey
- Guil : Vars
En 1951, suite à une réorganisation de l'Administration des Eaux et forêts, les Hautes-Alpes abritent dans siège de Gap la 31e Conservation, divisée en trois inspections : l'Inspection de Briançon (districts de Val-des-Prés, Briançon, Pont-de-Cervières, L'Argentière), l'Inspection d'Embrun (cantonnement de Guillestre - districts de Château-Ville-Vieille, Guillestre, Saint-Crépin ; cantonnement d'Embrun - districts d'Embrun ouest, Embrun est, Savines) et l'Inspection de Gap : Inspection de Gap-R.E., Inspection de Gap-RTM, cantonnement de Gap nord (districts de Chorges, Saint-Firmin, Saint-Bonnet, Pont-du-Fossé), cantonnement de Gap ouest (districts de Remollon, Gap, La Roche-des-Arnauds, Veynes), cantonnement de Gap sud (districts de Saint-Julien-en-Beauchêne, Serres, Eyguians).
Textes de référence (pour la Restauration des terrains en montagne uniquement) :
- Loi du 28 juillet 1860 sur le reboisement des montagnes, lettre circulaire n°795, du 17 août 1860, aux Conservateurs et lettre circulaire n°77, du 17 août 1860 aux Préfets ;
- Décret impérial n°9001 portant Règlement d'administration publique pour l'exécution de la loi du 28 juillet 1860, sur le reboisement des Montagnes, du 27 avril 1861 et circulaire n°425 du Ministère des Finances du 1er juin 1861 aux Préfets, circulaire n°806 du 1er juin 1861 aux Conservateurs ;
- Loi du 8 juin 1864 complétant, en ce qui concerne le gazonnement, la loi du 28 juillet 1860, sur le reboisement des montagnes, décret impérial du 10 novembre 1864 portant réglementation d'administration publique pour l'exécution des deux lois du 28 juillet 1860 et du 8 juin 1864, sur le reboisement et le gazonnement des montagnes, circulaire n°851 du 26 décembre 1864 aux Conservateurs et circulaire n°101 du 27 décembre 1864 aux Préfets ;
- Loi du 4 avril 1882 relative à la Restauration et à la Conservation des Terrains en Montagne, décret du 11 juillet 1882 et circulaire n°305 du 12 décembre 1882 ;
- Loi du 16 août 1913 modifiant et complétant la loi du 4 avril 1882 et circulaire n°827 du 19 janvier 1914 ;
- Loi du 6 janvier 1933 ayant pour but de faciliter le reboisement des terrains en montagne et circulaire n°949 du 24 janvier 1933 ;
- Loi n°85-1273 du 4 décembre 1985 - art. 69 JORF du 5 décembre 1985 - modifiant l'article L424-1 du code forestier ;
- Loi n°95-101 du 2n février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement - Dispositions relatives à la prévention des risques naturels.